Discours – Victoires de la musique 2023

Discours de Jean-Christophe Bourgeois, Président de de l’Association Tous Pour La Musique – vendredi 10 février 2023.

Madame la Ministre,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président des Victoires de la musique, Cher Stéphane Espinosa
Monsieur le Président du CNM,
Chers Consœurs, Chers Confrères et Amis,

Je suis très heureux de vous accueillir ce soir au nom de Tous pour la musique et de vous retrouver ici, enfin, à l’occasion de la 38e édition des Victoires.  Forte de 29 organisations membres, Tous Pour La Musique est une association représentative de tous les métiers et de toutes les esthétiques de la musique en France. Elle illustre ainsi la grande interdépendance de notre écosystème et sa volonté de porter une parole commune.

On ne le rappellera jamais assez, la musique est la première pratique culturelle des Français. Alors que les menaces climatiques, économiques, sociales et sanitaires, mais aussi la guerre aux portes de l’Europe, peuvent pousser au repli sur soi, nous savons que la Musique est une chance pour la France. Elle adoucit les épreuves, renforce le lien social et les moments de convivialité, rapproche les âges, les sexes, les origines, les opinions ou les cultures.

La cérémonie des Victoires est, elle, l’occasion de célébrer la création et la scène musicale française, remarquable pour sa variété, pour les émotions qu’elle transmet, pour sa capacité à inventer, à innover, et à toujours aller de l’avant. C’est pour elle que nous nous rassemblons aujourd’hui et que nous travaillerons encore demain, dans une élan collectif plus que jamais nécessaire dans les moments si particuliers que nous traversons.

Car la musique s’apprête à vivre une année aux multiples défis.

Alors que France TV, en partenariat avec Radio France, offre ce soir au public un moment unique de célébration des artistes et de la musique, le financement de l’audiovisuel public et plus largement la visibilité de la musique dans les médias sont plus que jamais au cœur de nos enjeux :

  • La richesse et la diversité de notre offre musicale se révèlent lorsque l’audiovisuel public est fort et que nos répertoires sont mis en valeur dans des émissions de qualités. C’est pourquoi nous demandons pour celui-ci des ressources pérennes, propres à garantir son rôle majeur de soutien à la création musicale française.
  • Nous veillerons aussi à la défense des dispositifs d’exposition et de financement de nos répertoires sur les médias privés : des quotas de chanson française à la radio – qui ne cessent de prouver leur efficacité – aux obligations musicales des chaînes de télévision, tout particulièrement sur le canal 6. A cet égard, nous serons extrêmement attentifs aux engagements souscrits par chacun des deux candidats à la reprise de la fréquence de M6 en matière de programmation musicale et d’investissements, à l’occasion de leur audition le 15 février prochain. TPLM et l’ensemble de ses membres soutiendront auprès de l’ARCOM le projet qui leur paraîtra le plus ambitieux en matière de programmation musicale et de niveau d’investissement dans ce domaine.

 

Dans un contexte inflationniste, qui affecte tous les secteurs économiques, tous les professionnels de la musique et qui entrave donc également le retour des spectateurs dans les salles, la reprise en demi-teinte du spectacle vivant constitue pour nos secteurs un autre défi majeur :

  • Le spectacle vivant dans son ensemble subit en effet depuis la reprise une hausse généralisée des coûts dont les facteurs sont multiples, à commencer par l’inflation des matières premières et en particulier des coûts énergétiques, le tout dans un contexte de pénuries de personnel et de matériels particulièrement importantes. Cette hausse contraint la création de spectacles tandis que la baisse de pouvoir d’achat entrave le chemin des salles pour certaines esthétiques.
  • La reprise n’est également pas uniforme sur l’ensemble du territoire et le public n’est pas au rendez-vous des scènes émergentes : les spectacles de petites et moyennes jauges sont les plus touchés et les spectacles d’artistes en développement particulièrement menacés. Face à ces difficultés, certaines salles se voient contraintes à des arbitrages lors de l’élaboration des programmations au détriment de la diversité culturelle à laquelle TPLM est historiquement attachée, et au risque de fragiliser l’émergence et le renouvellement
  • Ces répercussions se déclinent sur l’ensemble du territoire, aucune collectivité n’est épargnée. Certaines d’entre-elles s’abattent sur des structures culturelles déjà fragilisées par la stagnation voire la baisse des financements publics dans certains territoires, entraînant également des arbitrages douloureux sur l’activité même.
  • Enfin, si nous déplorons un dialogue trop tardif avec les pouvoirs publics quant à l’articulation des festivals avec les JOP 2024, il semble désormais clair que sport et culture doivent se conjuguer et non s’opposer. Nous y resterons particulièrement attentifs. Nous alertons également sur l’impact des JOP sur les spectacles qui se tiennent de mai à septembre dans les stades et les Arenas, qui ne seront pas disponibles en 2024 en particulier sur Paris et Lille. Ces concerts (de nombreux artistes internationaux) seront difficilement reportables, ce qui signifie des pertes pour les producteurs de spectacles mais aussi pour l’ensemble de l’écosystème, dont un impact non négligeable sur les droits d’auteur et la taxe fiscale.

 

2023 est une année charnière à beaucoup d’autres égards et la musique aura besoin d’appuis solides continuer à nous faire vibrer :

  • en premier lieu je veux citer ici la redevance pour copie privée, ressource incontournable de la vie culturelle qui permet à pas moins de 200 000 auteurs, artistes, éditeurs, producteurs de percevoir la juste rémunération de l’exploitation de leurs œuvres et enregistrements ; mais qui permet également de soutenir d’innombrables évènements culturels chaque année, au bénéfice du grand public.
  • Je veux citer aussi les crédits d’impôts en faveur de la production phonographique et pour le spectacle vivant qui doivent être prolongés et développés, de même que le crédit d’impôt en faveur de l’édition musicale dont nous nous réjouissons de la mise en œuvre.
  • Je tiens à saluer par ailleurs les travaux en cours pour une structuration d’une politique publique de la musique, notamment dans le cadre de la mission confiée par la Première ministre à Monsieur le sénateur Bargeton. Ce sont des rendez-vous majeurs pour tous les acteurs de la filière, leur donnant accès à une place de choix au sein des politiques cu
  • J’en profite également pour saluer le CNM et le rôle essentiel qu’il a joué pendant la crise, ayant mis en œuvre de multiples dispositifs d’urgence voués à accompagner l’ensemble des acteurs du secteur. Pour qu’il continue à déployer efficacement son action durant l’année, TPLM souligne la nécessité de le doter de financements adaptés. Monsieur le sénateur, il est inutile de rappeler à ce sujet les espoirs que chacun place dans les conclusions que vous présenterez au terme de votre mission.

 

Les préoccupations de TPLM ne sont pas circonscrites à une dimension économique, et notre association veut aussi afficher son soutien aux préoccupations sociales, sociétales et environnementales des acteurs de la filière.

  • L’enjeu des retraites était déjà un point d’attention majeur pour nos membres, il le demeure pour l’ensemble des professions de notre secteur à l’occasion de la réforme en cours
  • TPLM, avec l’appui du CNM, a déployé des actions concrètes en faveur de l’égalité des femmes et des hommes, en s’adressant à des dizaines de milliers d’élèves du secondaire, en s’attachant à déconstruire les stéréotypes de genre, en assurant la visibilisation des femmes dans tous nos métiers.
  • L’association salue également et encourage les initiatives nombreuses prises par ses membres sur le volet environnemental pour que chacun assure sa part face à l’urgence climatique. Dans ce contexte je ne citerai qu’un seul exemple dont la symbolique est forte : les entraves à la circulation des artistes de la musique par la SCNF nous plongent dans l’incompréhension:  la politique d’interdiction de transport d’instruments volumineux dans les trains est particulièrement choquante et n’existe du reste nulle part ailleurs dans le monde… La tutelle de l’établissement public doit veiller à y mettre un terme.

 

Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Monsieur le président des Victoires de la Musique, Monsieur le président du CNM, chers amis, Les Victoires de la musique sont un rendez-vous incontournable de la filière musicale. Elles sont bien sûr l’objet d’une coopération heureuse entre la filière et le service public mais surtout l’occasion aujourd’hui pour de nombreux artistes de retrouver leur public en prime time.

Les succès des artistes qui seront sur scène ce soir nous donnent également l’opportunité de célébrer le travail de l’ombre de nos multiples métiers et des centaines de milliers de passionnés qui les occupent (auteurs, compositeurs, musiciens, techniciens, managers, tourneurs, producteurs, attaché(e)s de presse, éditeurs…).

A toutes et tous, je tiens à rendre hommage pour la vitalité qu’ils apportent à notre secteur et pour la joie qu’ils procurent à tous les fans de musique en France et au-delà de nos frontières. 

Maintenant place aux Victoires, place à la musique et surtout place aux artistes !

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